GT du 1 juin 2021 : Actualité du Service de la sécurité juridique et du contrôle fiscal - Déclaration liminaire

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La crise du Covid 19 n’est pas encore terminée qu’il demeure pourtant possible de tirer un premier bilan de l’année 2020 suite à la parution de récentes données statistiques.

Tout d’abord, il est avéré que le gouvernement français a fait le choix de l’interventionnisme économique au cours de cette période inédite depuis la fin de seconde guerre mondiale.

Le « quoi qu’il en coûte » semble à l’opposé des politiques suivies depuis des années qui consistaient à œuvrer vers toujours moins d’État, moins de régulation et moins d’intervention publique. Ainsi, les partisans du libéralisme sauvage, les pourfendeurs des politiques publiques, les casseurs de services publics semblent redécouvrir la place de État comme acteur et régulateur de vie économique pour opérer son rôle d’amortisseur face à cette crise grave. Aussi, alors que Emmanuel Macron aimait à dire qu’il n’y avait pas « d’argent magique » pour sauver l’hôpital public, c’est plusieurs centaines de milliards d’euros qui auront été injectés dans les rouages de notre économie par différents moyens depuis plus an maintenant.

Nous avons appris que les sociétés du CAC 40 ont distribué 51 milliards de dividendes en 2020 soit davantage que les profits. Entendons-nous bien, ce capitalisme mondial de prédation préfère prélever sur les capacités d’investissement des grandes entreprises pour rémunérer les actionnaires que de maintenir les moyens qui participent à la souveraineté nationale et au-delà aux conditions économiques du maintien de l’emploi.

Bien évidemment la politique fiscale menée depuis l’arrivée de la République en Marche en 2017 favorise grandement ces dérèglements compte tenu de la suppression de l’ISF et de la mise en place de la Flat Tax qui à eux deux laissent un manque à gagner de près de 10 milliards d’euros par an au budget de l’État.

Comme si cela ne suffisait pas à satisfaire le patronat, le gouvernement a voté la baisse significative des impôts de production de 10 milliards d’euros également par an pendant deux ans.

Les agents des Finances Publiques et notamment ceux affectés à la mission de contrôle fiscal sont bien évidemment concernés par ces chiffres. Il apparaît donc évident que, d’un point de vue macro-économique les chiffres du contrôle fiscal seront mécaniquement impactés par cette conjoncture économique, tout comme ils le seront par le Crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) de l’année 2018 que l’administration a étendu aux rehaussements non frappés de manquements délibérés alors que le législateur avait été plus restrictif en le cantonnant initialement aux revenus spontanément déclarés. En ce sens, l’extension de la prescription d’un an pour le contrôle de 2018 n’apportera pas, nous le prédisons, de conséquences significatives.

Enfin, la baisse du taux d’IS sur un rythme pluriannuel aura également des impacts sur le rendement du contrôle fiscal.

La DGFIP doit anticiper ces éléments factuels en matière d’objectifs.

A propos des objectifs, nous réitérons notre devoir alerte concernant le double discours que tient la DGFIP. Vous nous dites que les objectifs du CF ne sont pas une fin en soi alors que les directrices et directeurs départementaux rappellent le maintien absolu des indicateurs de 2020 en 2021. Comment se fait-il, monsieur le Directeur, que vous ne soyez pas entendus sur ce point pourtant fondamental pour les milliers d’agents du CF ? Comment se fait-il que vos directives ne soient pas comprises ou pas appliquées ? Nous ne pouvons imaginer que nous soyons victimes à notre tour d’un double discours dans cette instance. Nous espérons avoir des éléments de réponses en séance.

Concernant les sujets mis à l’ordre du jour, nous évoquerons nos remarques, nos questions et nos revendications au fur et à mesure de l’examen des fiches.

Cependant d’un point de vue général, il est possible de tirer un certain nombre de lignes de force sur les thèmes abordés.

Tout d’abord, la CGT réaffirme son opposition de principe au contenu de la loi ESSOC. Pour nous, la DGFIP n’a pas à devenir un « partenaire » (vous ne nous cacher plus de ce mot désormais) des entreprises. Les agents du CF exercent une mission régalienne fondée sur trois objectifs : dissuasion, répression et ressources budgétaires. Le triptyque conseil, audit et compromission n’est pas l’horizon que nous souhaitons voir se développer au sein de la DGFIP.

Cette relation de confiance qui vous semble tellement bénéfique pour les entreprises est à coup sûr pour nous la marque d’une rupture brutale et culturelle de l'exercice de nos missions dans l’unique but de diminuer le pouvoir jugé exorbitant par les syndicats patronaux et autres groupe de pensée ultra-libéraux.

Ce qui nous désole, c’est que cette politique est menée par une direction générale composée encore de fonctionnaires de la DGFIP formés dans les valeurs de la République et des principes constitutionnels fondateurs du contrôle fiscal.

Aussi, vous peinez parfois à justifier l’injustifiable notamment quand vous assénez que le partenariat fiscal aux entreprises contribue à améliorer le civisme fiscal alors que deux paragraphes au-dessus vous indiquez que ce service est réservé aux entreprises qui respectent leurs obligations fiscales. Il faudra développer d’autres arguments plus censés pour nous convertir à ces compromissions avec le patronat.

Au sujet de la garantie fiscale, nous constatons que cette mesure est mal appliquée, car elle révolte bien souvent les vérificateurs. Au quotidien, nous pouvons témoigner qu’elle occupe un temps considérable dans les opérations de contrôle et qu’elle prévaut désormais sur le temps de rédaction des propositions de rectifications. Est-ce là l’orientation voulue initialement. A priori non. Aussi, la CGT revendique moins un script des bonnes garanties à accorder, qu’un véritable bilan sur cette pratique à la lumière du ressenti des collègues acteurs du CF. En effet de véritables dérives se font jour notamment dans la rédaction de garanties dans des propositions de rectifications interruptives alors que les textes prévoient la prise de position de l’administration aux termes des opérations de contrôles. Une fois de plus, le zèle dont fait preuve la direction au sujet de la garantie fiscale dépasse semble-t-il l’intention législative première.

Concernant l’ECF, la CGT réitère son opposition frontale à ce dispositif qui vise ni plus ni moins à engager la DGFIP vers la privatisation du contrôle fiscal. C’est une rupture évidente dans l’égalité face à l’impôt et de l’équité de traitement que doit l’administration aux contribuables professionnels. Ce nouvel outil aux mains de ceux qui peuvent se le payer est une attaque non voilée à la cohésion nationale et au vivre ensemble.

Enfin le bilan de la relation de confiance qu’établit le ministre Dussopt est à l’évidence bien éloigné de la réalité que nous constatons, nous, représentants des personnels élus, dans les services.

Mais au-delà de la divergence des points de vue, qui n’étonnent personne, c’est la présentation de ce bilan qui nous alerte. En effet, l’intégration des problématiques de la DGFIP et de l’URSSAF est une pierre supplémentaire à la construction d’une entité globalisée de contrôles qui devra inclure tant la fiscalité que les aspects de réglementation sociale. L’expérimentation de la limitation de la durée des contrôles illustre un peu plus cette vision à peine voilée de fusionner contrôles fiscaux et sociaux.

L’échec récent de la Fusion montre l’erreur stratégique majeure à ne pas commettre, à savoir vouloir fusionner deux pans de la réglementation que rien ne relie si ce n’est le caractère coercitif des contrôles.

Une seule fiche porte sur l’autre jambe de la loi ESSOC, à savoir la pénalisation des agissements frauduleux. Aussi, les documents de ce GT comportent 61 pages sur la relation de confiance, la garantie fiscale, le partenariat avec les entreprises et seulement 2 sur les sanctions.

Ce déséquilibre illustre à merveille le déséquilibre de la loi ESSOC.

La loi ESSOC ne marche pas sur deux jambes, elle claudique, n’est pas fait à dessein ? En tout état de cause en ce n’est pas en boitant que nous avons une chance de rattraper les fraudeurs.

Enfin, nous nous devons de vous alerter sur le moral des agents du CF qui est actuellement particulièrement mauvais.

En effet, après avoir subi la position de la Direction Générale au moment du Plan de Continuité d'Activités (PCA) rappelant que le CF n'était pas une mission prioritaire pour la DGFIP, ils sont désormais largement considérés comme une variable d'ajustement pour remplir les missions priorisées en fonction des besoins immédiats de la DG tels que Fonds de solidarité et campagne IR.

Aussi, les agents du CF participent à des actions périphériques pour lesquels leurs compétences et leurs expertises sont utiles à l'administration mais sans réelle prise en compte de la charge de travail ni de compensations financières (prime d'accueil par exemple). Pire, les directions locales ne sont pas du tout claires sur les conséquences de ces missions parallèles. La CGT exige la levée des doutes sur les objectifs quant aux allègements des objectifs de chaque agent qui aura participé à de telles missions.