La Responsabilité Personnelle et Pécuniaire du Comptable Public remise en cause par un amendement de la Commission des Finances !

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Nouvelle menace structurelle ! Dans le cadre du débat parlementaire relatif à la refonte du décret de 1962 portant règlement général de la comptabilité publique, la commission des Finances de l’Assemblée Nationale a retenu un amendement qui remet profondément en cause la notion de Responsabilité Pécuniaire et Personnelle du comptable et de la conception actuelle du débet.

En effet, cet amendement propose d’instaurer pour le comptable dont la responsabilité est mise en cause, une amende calculée en fonction de la gravité de la faute et proportionnelle au traitement du comptable concerné. L’objectif recherché est bien de supprimer toute possibilité de remise gracieuse accordée par le ministre.

Il faut dire que ce sujet n’est pas nouveau. Nombre de magistrats de la Cour et des Chambres Régionales des Comptes ont toujours eu du mal avec la notion de la remise gracieuse qualifiée de quasi-automatique et le « pouvoir régulateur » du ministre au motif d’un empiétement, donc d’une emprise de l’exécutif sur le législatif. Une conviction qui est, par ailleurs partagée par tous les adeptes de la mise en œuvre des directives européennes en matière de gestion financière.

Mais la réalité des services est toute autre. Car, il est faux de dire que la remise gracieuse est quasi-automatique. Nombre de comptables savent que des mises en débet ne sont pas systématiquement « effacées ».

D’autre part, l’allégement des procédures de contrôle, le CHD, les audits, les contrôles partenariaux, avec la recherche d’une certaine « labellisation » de la dépense qui nécessite de « squizzer » certains contrôles, la réduction de plus en plus forte des délais de paiement, modifient considérablement la chaîne de la dépense et le rôle des uns et des autres. Les conséquences sur les contrôles s’en ressentent, sans compter les difficultés criantes de fonctionnement des services dans un contexte de suppressions massives d’emplois et de difficultés bien réelles dans l’utilisation des outils informatiques.

Serait-il donc normal de faire supporter aux comptables, les conséquences de choix de contenu et d’organisation qui dépendent de la seule direction générale ? Assurément pas ! C’est tout le sens de la remise gracieuse qui permet de tenir compte de la réalité des services.

Sa suppression par l’introduction d’amendes incompressibles aurait-elle pour objectif de faire des comptables de nouveaux fermiers généraux disposant d’un patrimoine, de primes spéciales, bref d’une charge qui leur permettrait d’y faire face ? Ce que l’on nous proposerait alors, serait bien un retour en arrière de plusieurs siècles, beau levier de modernisation pour des parlementaires qui ne cessent de parler d’amélioration du système de responsabilité des gestionnaires !

D’ailleurs à ce propos, peu est dit sur la responsabilité des ordonnateurs. Il est vrai que la Cour de Discipline Budgétaire et Financière n’a jamais sauf une seule fois sanctionné un ordonnateur ! Là aussi, des voix s’élèvent pour moderniser cette responsabilité, mais les choses en ce domaine sont bien plus compliquées, et elle reste à définir.

Il est donc plus facile de stigmatiser la réalité de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics présentée comme théorique et non adaptée à une gestion moderne des deniers publics.

Derrière, c’est bien, nous le savons, une nouvelle tentative de remise en cause du principe de la séparation ordonnateur/ comptable, qui sous prétexte d’aménagements, reste la cible des libéraux.

Pour la CGT Finances Publiques, le rôle rempli par le comptable public dans le cadre de la séparation de l’ordonnateur et du comptable, tant en dépense qu’en recette, offre plusieurs garanties.

Pour l’Etat, il est le garant du respect des principes comptables dans l’exécution du budget. Pour les collectivités locales et plus particulièrement pour les citoyens et les assemblées délibérantes, il est le garant du respect des principes et de la réglementation comptables. Dans ce cadre, la CGT réaffirme la notion de responsabilité personnelle et pécuniaire (RPP) du comptable comme une garantie de la bonne régularité de l’emploi des fonds publics, de la sincérité des comptes et de l’indépendance et du positionnement du comptable vis-à-vis de l’ordonnateur.

C’est en ce sens que la CGT Finances Publiques est intervenue auprès de la Direction Générale des Finances Publiques qui nous a assuré suivre très sérieusement, ce dossier. Le débat à l’assemblée nationale n’est pas encore terminé, cet amendement doit être retiré. La CGT interviendra pour que soit défendu l’exercice de la responsabilité du comptable, et plus largement pour que soient respectées les marques fortes de la spécificité de la comptabilité publique.